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Plasticienne. Créatrice de la Grande Lessive (site http://www.lagrandelessive.net, blog http://www.lagrandelessive.com) Performeuse : conférences-performances publiques et interactives sur l'art et sa définition. http://www.culturecommunication.gouv.fr/index.php/Politiques-ministerielles/Education-artistique-et-culturelle/Actualites/Conference-Performance-Un-conte-pedagogique-de-Joelle-Gonthier Conceptrice de dispositifs. Entre autres : http://classes.bnf.fr/clics/accueil/presentation.htm, http://expositions.bnf.fr/portraits/pedago/cent/index.htm,http://expositions.bnf.fr/objets/pedago/00.htm,http://expositions.bnf.fr/lamer/parcours/index.htm

L'art au quotidien est écriture de l'art en train de se faire, ici et maintenant, dans mon atelier ou dans mon jardin, en ville ou sur d'autres territoires. Support destiné à une lecture publique, il retient une écume qui dira ce qu'elle est plus tard. (Tous droits réservés pour les textes et les images).

lundi 14 avril 2008

Oser la peinture
Pour l’enseignement artistique à l’école élémentaire


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« Se voir peindre »

La peinture est indissociable de notre histoire. Son apparition paraît aussi naturelle que celle du feu. Pourtant tous deux résultent d’une action humaine dans laquelle la pensée occupe un rôle décisif. Il est possible de donner la composition chimique et physique de ce médium appelé « peinture », toutefois ses dimensions artistiques possèdent des frontières infiniment complexes qui retirent toute validité à une définition s’aventurant au-delà. Cette difficulté à énoncer ce qu’est la peinture distingue celle-ci d’une simple technique à acquérir. La peinture « bouge » avec nous. Du peintre qui la fait au regardeur qui l’active, un apprentissage est nécessaire.
Si le feu semble associé à la vie de manière indéfectible, le caractère vital de la peinture ne paraît pas établi aux yeux de tous. Son étude est proposée à l’occasion quand l’apprentissage de l’écriture est imposé pour vivre en société. Or l’histoire et l’ethnologie ont démontré l’importance de l’art afin de révéler ce que ne dit pas « le reste ». De cet enseignement-là, certains ne préfèrent retenir que le passé de l’art supposé offrir un plus grand intérêt pour l’école. Le « patrimoine » -en somme l’objet sans l’homme- se prête alors à une conservation et à une valorisation qui se traduisent en visites de groupes et peu en enseignement de l’histoire de l’art en classe, tandis que la pratique passe pour une vaine gesticulation face aux exigences scolaires. L’imaginaire qui détache des contraintes quotidiennes et le plaisir pris à le mettre en œuvre effrayent.

La première victime de cette discrimination est l’art lui-même si lié à la vie et à la pensée que celles-ci se lisent dans les œuvres : comment en effet expliquer l’émergence d’artistes sans l’action de l’école si ce n’est en succombant au mythe du don ? La transmission d’une part de ce qui fait notre humanité est compromise puisque la mise à l’écart de la pratique artistique est aussi celle de l’expérience de l’autre. L’enfant, dans son développement et sa formation, est atteint.

L’énigme s’épaissit alors. Pourquoi l’enseignant s’implique tant dans l’apprentissage de la lecture et du calcul, et abandonne si vite ce qui pourrait, à la fois, l’y aider et déborder l’espace du quotidien pour explorer une dimension de notre être qui ne le sera pas autrement ? Les mêmes « valeurs » ne sont-elles pas en jeu ? Les programmes expliquent-ils tout ? Pourquoi laisser supposer -y compris à nous-mêmes- qu’il existe des domaines qui ne s’enseignent pas et des personnes qui ne peuvent apprendre ? Oser la peinture à l’école, c’est gagner l’espace d’une pratique sociale et artistique dont nous nous sentons souvent exclus. « Se voir faire » de la peinture et de la sorte s’autoriser à la pratiquer est aussi important que posséder le désir de « voir ce que cela donne ». (à suivre)